RICHESSE ET PATRIMOINE MAROCAINS

Tizrgane, la couronne de pierre d’Ida Ougnidif

3/11/2025
KASBAT TIZOURGAN

Accrochée à un piton granitique de l’Anti-Atlas, Tizrgane est un ksar/agra­dir fortifié qui domine les vallées d’amandiers et d’arganiers du Sous-Massa. Son plan en couronne, ses remparts en pierre sèche et son unique porte d’accès en ont fait, des siècles durant, un refuge sûr pour les familles et leurs réserves. Aujourd’hui, le site raconte à ciel ouvert l’ingéniosité constructive amazighe et l’art de bâtir « avec la montagne ».

Où se trouve Tizrgane ?

Tizrgane appartient au territoire d’Ida Ougnidif (province Chtouka Aït Baha). On y accède depuis Agadir par la route de l’Anti-Atlas en direction de Tafraout. Après Aït Baha, la silhouette du village perché apparaît, posée comme un diadème sur son éperon rocheux. Un court détour permet d’atteindre la porte monumentale.

À retenir : Tizrgane est souvent associée à Tafraout dans l’imaginaire des voyageurs, mais elle relève bien d’Ida Ougnidif.

Brève histoire

Les traditions locales situent l’origine de Tizrgane au Moyen Âge. Comme de nombreux ksour de l’Anti-Atlas, le site aurait connu des phases successives d’agrandissement (remparts, maisons imbriquées, tours de guet) au gré des besoins défensifs et de la croissance communautaire.
Au fil du temps, la fonction a glissé du poste défensif au grenier collectif (agadir), garantissant la sécurité des denrées (orge, huile d’argan, amandes), des semences, des actes et objets précieux.

Architecture de Tizrgane : comment le ksar épouse la montagne de l’Anti-Atlas

  • Implantation topographique. Tizrgane épouse la forme du relief : un cône granitique aux flancs abrupts, minimisant l’effort défensif et offrant une vue circulaire sur la vallée.
  • Remparts et appareil. Les murs en pierre locale (souvent montés à sec ou au mortier terre/chaux) dessinent un anneau continu. La pierre, abondante, réduit le besoin en bois et résiste aux amplitudes thermiques.
  • Trame intérieure. Un accès unique mène à un lacis de ruelles étroites et de passages couverts. Les maisons s’imbriquent en gradins, partageant des murs mitoyens qui améliorent l’inertie thermique.
  • Espace collectif. À l’intérieur, on distingue des cellules de stockage superposées, des petites placettes, parfois une mosquée et un bastion de guet dominant la porte.
  • Savoir-faire. La mise en œuvre joue sur l’épaisseur des murs, la petite pierre calée au marteau, et des chaînages de bois ou de dalles pour stabiliser les plans.

Vie sociale et usages

Un agadir est plus qu’un bâtiment : c’est une institution. Chaque famille dispose d’alvéoles numérotées, gérées par un gardien (ou un conseil) selon des règles coutumières. L’accès, l’entretien, la réparation et la répartition des charges sont réglés par la taqbilt / Inflasse (assemblée de la tribu).
Tizrgane montre comment l’architecture répondait à des enjeux très concrets : sécurité, économie (protection des récoltes), gestion de l’eau et cohésion du groupe.

Restaurations et sauvegarde

Au cours des dernières décennies, Tizrgane a bénéficié d’initiatives de restauration portées par des habitants, des artisans, et des acteurs locaux du patrimoine. L’enjeu est double :

  1. Sauvegarder les structures anciennes (remparts, parements, charpentes locales) en respectant les techniques d’origine ;
  2. Réactiver le site grâce à des usages compatibles (accueil, maison d’hôtes, visites guidées, médiation culturelle), afin de maintenir un équilibre économique.

Visiter Tizrgane : conseils pratiques

  • Meilleure saison : fin d’hiver–printemps (amandiers en fleurs) et automne.
  • Heures dorées : matin et fin de journée mettent en valeur le relief et les textures de pierre.
  • Chaussures fermées recommandées (pentes, marches irrégulières).
  • Respect des lieux : demander l’autorisation avant de photographier les personnes ; ne pas grimper sur les parapets ; rapporter ses déchets.
  • Guides locaux : contacter les propriétaires ou se renseigner au village au pied du site ; c’est la meilleure façon d’obtenir histoires orales et accès aux zones fermées.

Pour les passionnés d’architecture

  • Lecture de plan. Repérer l’anneau défensif, la porte unique, les circulations concentriques et les cœurs domestiques (patios, foyers).
  • Détails à observer. Les meules anciennes, les linteaux sculptés, les systèmes d’égouttage, les pierrettes de calage et les joints à la chaux.
  • Comparaisons régionales. Tizrgane dialogue avec d’autres agra­dir de l’Anti-Atlas (Aït Baha, Amtoudi, etc.) tout en gardant sa signature : un positionnement spectaculaire et un plan presque annulaire.
Tizrgane ou Tizourgane ?
On rencontre plusieurs transcriptions : Tizrgane, Tizourgane, Tizergane. Elles renvoient au même site, la variation venant du passage de l’amazighe à l’arabe puis au français. Utiliser une graphie principale (ex. Tizrgane) et mentionner les variantes entre parenthèses aide les lecteurs… et les moteurs de recherche.

FAQ

Tizrgane est-elle un grenier ou une forteresse ?
Les deux. Le site a cumulé une fonction défensive et de stockage collectif, comme beaucoup d’agra­dir de l’Anti-Atlas.

Peut-on entrer à l’intérieur ?
Oui, selon l’état de conservation et les zones ouvertes. Il est recommandé de prendre un guide local.

Combien de temps pour la visite ?
Comptez 1 h 30 à 2 h pour monter, faire le tour des remparts et parcourir les ruelles.

Auteur
Photo de profil du docteur Zahra Boughroudi

Zahra Boughroudi

Docteure en langues et communication et titulaire d'un master en tourisme et communication. J’ai eu l’occasion de développer l’expertise dans le domaine de la communication touristique. J’ai mené des recherches en ingénierie touristique et en développement du tourisme culturel.