RICHESSE ET PATRIMOINE MAROCAINS

Héritage social et rôle des femmes dans la tribu marocaine précoloniale

17/1/2023
Femme Amazigh Marocaine en train de contempler les montagne de l'atlas

Avant la colonisation, le Maroc était une société majoritairement rurale, structurée autour de l’organisation tribale. Dans ce système, les femmes jouaient un rôle essentiel, à la fois économique, social et culturel. Gardiennes des valeurs et actrices de la résistance, elles ont marqué l’histoire du pays. Cet héritage social continue d’influencer la société marocaine contemporaine.

La vie quotidienne au Maroc précolonial

La population vivait surtout à la campagne. Les femmes assumaient de multiples responsabilités :

  • travail agricole (labour, récolte, irrigation),
  • transport de l’eau depuis les sources,
  • artisanat (tissage, poterie, broderie),
  • gestion domestique (ménage, couture, jardinage, entretien du linge),
  • soins aux enfants, aux malades et aux personnes âgées,
  • garde des animaux domestiques.

Elles incarnaient la notion sacrée de la famille et contribuaient à la cohésion de la tribu. Leur travail constituait le pilier de la survie collective.

L’organisation tribale : une gouvernance collective

Le système tribal marocain reposait sur des valeurs d’unité et de solidarité. Chaque échelon social avait un rôle précis :

La petite famille (Takat)

Unité de base composée du père, chef de famille, de la mère (ou épouses), des fils et petits-fils. Le père gérait les affaires extérieures, tandis que la femme administrait la vie interne et soutenait les activités agricoles.

La grande famille (Os ou Ikhesse)

Regroupement de plusieurs petites familles, elle disposait d’un territoire et d’une autonomie décisionnelle, gérée par l’Azrf (droit coutumier). La propriété foncière restait indivise et l’organisation sociale était collective.

Le hameau (Tadcherte)

Réunion de plusieurs grandes familles, parfois ouvert aux étrangers qui pouvaient s’y installer. Ces derniers contribuaient à la main-d’œuvre et au brassage social, sans toutefois accéder à la propriété foncière.

Le gros village (Moudaa)

Ensemble de hameaux, identifiable par la présence d’une mosquée, d’un grenier collectif (agadir) et d’une assemblée (jemaate) des hommes en âge de combattre.

La fraction ou canton (Takbilte)

Constituée de plusieurs moudaa, elle formait une entité politique autonome, véritable micro-État tributaire de ses propres règles.

Les femmes, gardiennes de l’héritage social

Les femmes marocaines n’étaient pas de simples exécutantes. Elles étaient les dépositaires de la langue, de la culture et des traditions.

  • Elles assuraient la transmission orale des récits.
  • Elles perpétuaient les chants, proverbes et coutumes.
  • Elles jouaient un rôle central dans l’éducation et la préservation de l’identité collective.

Femmes et résistance contre le colonialisme

Leur rôle prit une dimension héroïque au moment de l’invasion coloniale :

  • Pendant la guerre du Rif (1921), elles soutinrent Mohamed Ben Abdelkrim El Khattabi.
  • Elles approvisionnaient les combattants en nourriture et en eau.
  • Elles transportaient des armes, surveillaient l’ennemi et transmettaient des messages codés.
  • Certaines participaient directement aux combats, jetant pierres, eau ou huile bouillante sur les envahisseurs.
  • Elles allaient jusqu’à demander le divorce si leurs maris refusaient de se battre.

Ces actes courageux illustrent la force des femmes amazighes dans la lutte pour la liberté.

Héritage et continuité

Bien que leur rôle ait été minimisé dans les récits nationalistes post-indépendance, la mémoire orale a transmis leurs exploits. Aujourd’hui, les femmes marocaines continuent d’assumer cette mission :

  • au Maroc, en protégeant la famille et les valeurs culturelles,
  • à l’étranger, en représentant la tolérance, la générosité et la loyauté, tout en restant attachées à leurs racines.

L’organisation tribale précoloniale était fondée sur la solidarité et la démocratie coutumière. Au cœur de ce système, les femmes ont joué un rôle vital : actrices économiques, gardiennes de la culture et héroïnes de la résistance. Cet héritage social reste vivant et inspire encore aujourd’hui.

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Auteur
Photo de profil du docteur Zahra Boughroudi

Zahra Boughroudi

Docteure en langues et communication et titulaire d'un master en tourisme et communication. J’ai eu l’occasion de développer l’expertise dans le domaine de la communication touristique. J’ai mené des recherches en ingénierie touristique et en développement du tourisme culturel.