Le partage occupe une place centrale dans la culture marocaine. Hérité de valeurs ancestrales et religieuses, il se manifeste dans la vie quotidienne mais aussi dans des cérémonies collectives profondément ancrées dans les traditions. Parmi elles, le Maârouf et les différents moussems constituent des moments forts où la solidarité, la foi et la convivialité se rencontrent.
Le « Maârouf » est une tradition profondément ancrée dans la culture marocaine. Il désigne tout acte de bienfaisance, de solidarité et de charité accompli envers autrui. Offrir de la nourriture, aider les nécessiteux, contribuer à une cérémonie collective ou soutenir un voisin dans le besoin : autant de gestes considérés comme du Maârouf.
Au-delà d’un simple acte de générosité, le Maârouf reflète une valeur spirituelle et sociale. Il incarne la conviction que le partage et l’entraide renforcent les liens de la communauté et attirent la baraka (bénédiction). Véritable pilier du vivre-ensemble, le Maârouf demeure aujourd’hui un symbole de la fraternité marocaine.
Dans les familles et les villages, partager n’est pas seulement un acte de générosité mais un devoir moral et spirituel. Que ce soit à travers un repas collectif, l’accueil d’un invité, ou encore l’aide aux plus démunis, le Marocain vit le partage comme une source de baraka (bénédiction).
Maârouf est une cérémonie à vocation religieuse, destinée avant tout aux pauvres et aux errants de la tribu. Organisée dans un mausolée ou une mosquée, elle réunit la communauté autour d’un même objectif : partager nourriture, dons et prières pour renforcer la solidarité entre les habitants.
Les Ismgan, descendants d’esclaves venus jadis du Ghana, ont préservé leurs rituels devenus aujourd’hui une tradition culturelle. Durant ce moussem, ils collectent les dons de la population afin d’organiser une cérémonie marquée par des danses et des pratiques de guérison.
Les femmes, persuadées du pouvoir spirituel des Ismgan, amènent leurs enfants malades et parfois acceptent même que ceux-ci reçoivent un nouveau prénom censé éloigner le mal. Ce rituel illustre une forme de partage spirituel et thérapeutique au sein de la société.
Célèbres pour leurs acrobaties spectaculaires, ces hommes errants animaient les villages de l’Anti-Atlas occidental, notamment les tribus d'Aït Toufaout.
Leur passage était un jour de fête : jeux acrobatiques le jour, veillée conviviale le soir, et invocation de bénédictions pour les habitants.
En échange, les villageois leur offraient aumônes et repas collectifs, renforçant encore l’esprit de partage et d’hospitalité.
Célébré chaque année en mars dans les tribus de Tamayelt et Tifraden à Idaougnidif Chtouka Ait Baha au sud du Maroc, ce moussem associe tradition et économie locale. Les associations y exposent des produits du terroir : huile d’argan, herbes médicinales, vêtements traditionnels, plats comme le Berkuks.
Côté culturel, les femmes préparent la Tagoula ntemzine (bouillie d’orge au beurre fondu), servie dans deux grandes marmites pour les hommes et les femmes.
La fête se poursuit par des invocations rituelles et un grand Ahouach (danse collective) jusqu’à l’aube. Un exemple parfait de partage alimentaire, culturel et spirituel.
Lors de la récolte des amandes, chaque famille de la tribu offre un kilogramme en guise de contribution. Ces dons sont ensuite revendus au souk, et avec l’argent collecté, les organisateurs achètent une vache ou un veau destiné au sacrifice. La viande est ensuite répartie équitablement entre les familles, proportionnellement à leur nombre.
Chaque foyer prépare alors un tagine avec la part reçue, et l’ensemble des habitants se retrouvent pour un grand repas collectif. La journée se clôt par une soirée d’Ahouach, symbole de joie et de communion.
Ainsi, une simple ressource agricole – l’amande – devient le moteur d’un véritable partage alimentaire, festif et spirituel, renforçant les liens de solidarité au sein de la communauté.
À travers ces cérémonies et moussems, le Maroc illustre parfaitement la place du partage dans sa culture. Qu’il s’agisse de nourrir les pauvres, d’accueillir des voyageurs, de soutenir les traditions locales ou de partager un repas collectif, chaque Maârouf rappelle que la solidarité est une valeur fondamentale de la société marocaine.
Ces traditions, à la fois religieuses, sociales et culturelles, montrent que le Maroc ne se contente pas de préserver son patrimoine : il continue à le vivre au quotidien, dans un esprit de fraternité et de baraka.
Docteur en langues et communication et titulaire d'un master en tourisme et communication. J’ai eu l’occasion de développer l’expertise dans le domaine de la communication touristique. J’ai mené des recherches en ingénierie touristique et en développement du tourisme culturel.