La Lune fascine depuis toujours. Au Maroc, elle incarne bien plus qu’un simple astre : elle est mythe, calendrier, superstition et rituel. Entre mythologie amazighe, pratiques religieuses, fantasmes et représentations culturelles, la Lune occupe une place centrale dans l’imaginaire collectif marocain. Aujourd’hui, avec l’événement céleste du moment — la Lune rouge, ou éclipse lunaire totale — les Marocains retrouvent, une fois de plus, ce lien ancestral.
Chez les Amazighs, la Lune, appelée “Ayyur”, était vénérée comme une déesse liée à la fécondité, à la beauté et au féminin. Ce symbolisme ancien demeure vivant dans les récits et pratiques populaires.
- Le calendrier hégirie est totalement basé sur les cycles lunaires.
- L’apparition du croissant (hilal) marque le début des mois sacrés, notamment le Ramadan.
- Ces moments sont célébrés par des communautés entières.
Lorsque survient une éclipse de Lune (khousouf) :
- Elle est vue comme un rappel de la puissance divine.
- Les Marocains accomplissent la prière spéciale “Salat al-Khousouf” accompagnée de sermons sur la repentance.
- Le phénomène, autrefois interprété comme prophétique, est aujourd’hui avant tout spirituel.
- On croit que cheveux et ongles poussent plus vite coupés sous la Lune croissante.
- Des légendes urbaines évoquent des transformations nocturnes à la pleine Lune, à l’image de Aicha kandisha.
- Les éclipses étaient autrefois considérées comme dangereuses, nécessitant talismans et amulettes.
Un autre élément central des croyances populaires marocaines est celui des enfants “Zuhri”.
- On raconte qu’un enfant Zuhri possède des traits physiques particuliers(comme une ligne unique dans la paume de la main, des yeux différents, etc.).
- Dans le folklore, ces enfants seraient liés aux forces surnaturelles etcapables d’indiquer l’emplacement de trésors cachés, souvent associés à la Lune et aux djinns.
- Cette superstition illustre l’importance accordée au mystère, à la magie et à l’invisible dans la culture populaire.
Lors des phénomènes exceptionnels comme la Lune rouge (lune de sang), on raconte que les enfants Zuhri ressentent un malaise ou une angoisse particulière. Dans l’imaginaire populaire, cela serait lié à leur supposée sensibilité aux énergies lunaires et aux forces invisibles qui se manifesteraient plus intensément lors d’une éclipse.
Malheureusement, certaines dérives ont existé, avec des histoires sombres de rituels impliquant ces enfants. Cela rappelle combien les croyances peuvent parfois basculer du folklore vers des pratiques dangereuses.
Les talismans (ḥijāb,ta‘wīda), souvent écrits sur cuir ou papier, sont utilisés pour se protéger des mauvaises influences, notamment lors de phénomènes célestes exceptionnels.
- Une éclipse lunaire totale, dite “lune de sang”, est prévue le 7–8 septembre 2025 et sera totalement visible au Maroc.
- Elle durera environ 82 minutes, avec la teinte rouge atteinte autour de18h30.
- Cet événement suscite fascination et rassemblements d’amateurs d’astronomie et de photographes.
- Le phénomène réactive aussi des symboles ésotériques : visions de renouveau, transformation spirituelle et rituels d’introspection.
Sur les réseaux sociaux marocains, le phénomène de la Lune rouge a ravivé de nombreuses discussions autour des personnes Zuhri. Plusieurs témoignages circulent affirmant que ces individus ressentiraient des symptômes physiques et psychologiques particuliers lors de ce type d’événement céleste : fatigue soudaine, insomnies, anxiété, maux de tête ou encore sensations de malaise inexpliquées. Certains créateurs de contenu, qui se présentent comme des “rouqates” (praticiens de la roqya, la guérison spirituelle par la lecture coranique), publient même des conseils pour aider ceux qui ignorent qu’ils sont potentiellement Zuhri. Ils recommandent par exemple des prières spécifiques, des invocations protectrices, ou encore l’usage de certains rituels de protection afin de se prémunir contre les influences négatives ou les attaques invisibles attribuées aux djinns. Ces échanges montrent combien la figure du Zuhri, entre croyance populaire, mysticisme et pratiques religieuses, continue de nourrir un imaginaire collectif vivant et réinterprété à l’ère numérique.
Le film marocain “Sīdal‑Majhūl (L’Inconnu Saint)” illustre, avec humour et réalisme, la place de la superstition dans les zones rurales, où la Lune devient le symbole du mystère et de l’invisible.
La Lune demeure, au Maroc, un pont entre le ciel et les croyances humaines. Entre religion, mythes, superstitions et pratiques culturelles, chaque phase ou événement lunaire —comme la Lune rouge actuelle — joue un rôle de spectacle et de réactivation symbolique du patrimoine culturel.
Docteur en langues et communication et titulaire d'un master en tourisme et communication. J’ai eu l’occasion de développer l’expertise dans le domaine de la communication touristique. J’ai mené des recherches en ingénierie touristique et en développement du tourisme culturel.